Estados Generales del Psicoanálisis

Réponse a Paulo Roberto Pires
8 juin 1998

Elizabeth Roudinesco

Il est difficile de dire que Jean Allouch prend parti en faveur de la torture car son livre est délirant, illisible. Par moment, je me demande s' il comprend lui-même la signification de ce qu' il écrit. Ce qui se dégage de ce livre est une haine systématique à l' égard de ce qui est reconnu et de ce qui fait autorité: les attaques contre Jacques Derrida et René Major relèvent d' un jalousie persecutive. Je connais bien Jean Allouch, nous avons entretenu pendant vingt ans des relation amicales. Malheurement, depuis quelques années, il a "dérapé", il s' est noyé dans une sorte de folie langagière et ses textes ressemblent a des écrits paranoïaques. Aussi n' ont-ils ici aucune audience. Allouch avait autrefois du talent et de la générosité. Il a fondé une revue et une école avec des amis de sa génération qui maintenant l' ont quitté à cause de ses violences et de sa pulsion destructrice. Tel un gouru, il est entouré d' une petite cohorte d' admirateurs et j' avoue ne pas bien comprendre pourquoi son livre a été traduit au Brésil. Bien entendu, il y a dans ce livre un véritable prise de position en faveur de la torture. Allouch semble fasciné par les tortionnaires mais cette fascination ne signifie pas qu' il aurait été du co´te des bourreaux dans les conditions réelles d' exercice de la dictature. Elle renvois a une vision psychotique et apocalyptique du monde: tout est pourri et abject dans un tel discours, tout est à l' encontre de ce qui est visible. Il suffit donc que l' on parle d' un livre qui touche aux obsessions d' Allouch pour qu' Allouch écrive un livre hostile à ce livre, comme s' il se sentait persécuté en permanence, torturé par des ennemis imaginaires, à la manière d' un chef de secte. Je crois qu' il ne faut pas donner à tout cela une grande audience. Personne ne soutient ici en France un tel discours. Et ce discours et le symptôme d' une certaine dislocation du champ lacanien, d' une extrémisation de certains aspects de la conceptualitée lacanienne devenue folle à force de vouloir formaliser en termes de noeuds et de topologie l' essence même de la psychose. De grâce, chers amis brésiliens, oubliez Allouch. Il faut pour l' an 2000 que la psychanalyse sorte de son jargon, de la sclérose, de ses dogmes et de sa folie pour redevenir la grande aventure d' une exploration du psychisme et surtout pour qu' elle sache répondre a toutes les souffrances nées de la mondialisation, de la technologie médicamenteuse et de la réduction des homme a des marchandises.


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